La RGEA (Rodrigues Government Employees Association) n’y est pas allé par quatre chemins. Pour ce syndicat de la fonction publique, le budget présenté par le gouvernement régional manque de vision, de courage et de conviction politique pour adresser les vrais problèmes des Rodriguais qui sont le chômage, l’eau et l’exode face à la misère, entre autres.
C’est un budget “business as usual” et décevant. Il ne contient aucune mesure qui va vraiment permettre au Rodriguais de devenir “catalyseur” de développement. Malgré les défis urgents, le budget de développement n’a pas été augmenté si l’on tient compte de l’inflation.
De budget en budget, selon Mons Alain Tolbize, Président de ce syndicat, les problèmes restent entiers et ne font qu’empirer. Il déplore le manque de courage et de détermination du gouvernement régional de rompre avec un système de budget négocié qui a donné lieu à un échec total pendant les 15 dernières années. Pour preuve le Président dira que le Chef Commissaire et son gouvernement n’ont pas pris en considération la section 46 de la RRA Act qui prévoit des critères spécifiques pour l’allocation des ressources financières à Rodrigues.
Le syndicat est d’avis qu’au lieu de faire l’éloge des projets de développement dans le port et à l’aéroport proposé par le gouvernement central, l’Assemblée Régionale aurait dû présenter son propre projet pour trouver des solutions aux problèmes que font face la majorité de Rodriguais.
Autre point de discorde: la privatisation annoncée de la gestion du dessalement de l’eau. Pour la RGEA c’est une mesure choquante, révoltante, rétrograde et même dangereuse. Elle constitue une trahison envers le peuple Rodriguais. Alain Tolbize ne comprend pas comment ce même gouvernement, qui était farouchement contre (avec raison) le “Rodrigues Water Company” à l’époque, vienne aujourd’hui remettre sur le tapis le projet de privatisation. C’est aberrant, d’autant plus que la privatisation, selon lui, n’a pas marché dans plusieurs pays; et donc dans le contexte Rodriguais ce sera une catastrophe pour le peuple.
Plus qu’une nécessité, l’eau deviendra une “marchandise” à la portée de ceux qui pourront se permettre d’en acheter. Et à quel prix? “Est-ce que ce projet sera vraiment viable dans le soulagement des souffrances des Rodriguais?” se demande-t-il. Car, selon ses renseignements, une étude récente indiquerait que l’eau coûterait plus de Rs 50 le litre. Autant consommer l’eau de table, dira-t-il.
C’est pourquoi la RGEA condamne cette décision et fait un appel au gouvernement régional de ne pas donner suite à ce projet.
La RGEA demande également des éclaircissements sur les points suivants:
- Le montant dépensé pour la mise sur pied des différentes unités de dessalement,
- La publication les rapports en ce qui concerne le coût de l’eau par litre,
- Si l’eau deviendra payante,
- Pourquoi ne pas recruter et former les Rodriguais pour entreprendre la gestion de ce secteur au lieu d’avoir recours au secteur privé,
- Pourquoi ne pas considérer la construction des barrages, réservoirs et autres structures pour le captage d’eau au lieu d’avoir recours au dessalement, qui ne doit être qu’une mesure palliative.
Il n’y a pas que ça. Le syndicat demande à l’Assemblée Régionale d’instituer un “departmental inquiry” pour faire toute la lumière sur le projet de dessalement surtout en ce qui concerne le montant investi, sa viabilité et s’il vaut vraiment la peine de continuer à injecter de l’argent dans ce type de production et de fourniture d’eau qui, selon elle, n’a pas donné des résultats concluants.
Enfin Alain Tolbize demande de remplir les 2000 postes vacants dans le service civil pour pouvoir être en mesure d’offrir un service plus efficace au public. Il considère que le recrutement “piecemeal” n’aura pas l’effet escompté en l’absence d’un rapport du consultant pressenti pour revoir toute la structure et l’establishment de l’Assemblée Régionale.
Le budget n’est donc pas du goût de la RGEA, d’autant plus qu’elle avait fait des propositions pertinentes pour assainir au mieux la situation des Rodriguais. Dans un mémoire pré-budget addressé à l’Assemblée Régionale, la RGEA avait fait un “a formal appeal to the Chief Commissioner to take appropriate measures so that adequate funds are made available in the budget for the filling of all vacancies on the RRA Establishment as it is the case for the civil service in Mauritius if we really want the Autonomy to succeed”.
Elle avait aussi proposé des subsides pour les denrées essentielles de base importées de Maurice pour pallier au coût de la vie bien plus cher à Rodrigues qu’à Maurice: “we are proposing that appropriate funds be made available to subsidize all basic essential commodities imported from Mauritius”.
Le syndicat pense que le “Central Government has a constitutional duty to allocate budgets and human resources fairly to the Regional Government”. Pour justifier sa position il citera la section 46 de la “Rodrigues Regional Assembly Act” comme suit:
“46. Criteria to be considered for allocation of financial resources to Rodrigues
In considering the draft estimates approved by the Regional Assembly, Cabinet shall give due consideration to the financial and development needs of Rodrigues in the context of Mauritius and shall, for a fair allocation of financial resources to Rodrigues, take into account-
- the physical separation of Rodrigues from the Island of Mauritius;
- Rodrigues’ distinct history and identity;
- Rodrigues’ isolation from the principal national growth centres;
- the absence of the multiplier effect from expenditures and investments (private and public) made in the Island of Mauritius;
- the restricted opportunities for employment and career fulfilment in Rodrigues;
- the impracticability of participation by residents of Rodrigues in the major educational, cultural and sporting facilities located in the Island of Mauritius;
- the lack of sustained development in Rodrigues ;
- the amount of grant which could have been payable to it, had it been a Municipal or District Council;
- the special needs of Rodrigues in terms of accelerated development; and
- the state of public finance and of the economy of Mauritius in general”.
AMANOOLA KHAYRATTEE